CULTURE DANS LA MENOUA :
Dr Alexandre Djimeli a dédicacé son ouvrage sur les rapports entre médias et politique.
« La veille de la célébration de la fête Nationale de l’unité est un prétexte idoine à l’organisation de la présente cérémonie de dédicace, car nous pensons que le livre participe aussi à l’intégration nationale… » Nazaire Mvogo, éditeur à Ifrikiya.
"Médias et politique au Cameroun : Les dynamiques de (dé)construction démocratique." Tel est le titre de son essai, paru en 2017, que Dr Alexandre T. Djimeli, journaliste en retrait, enseignant-chercheur en études africaine à l’université de Dschang (UDs), a dédicacé le jeudi 17 mai 2018, en la salle Manu Dibango de l’Alliance franco-camerounaise de Dschang. Dans sa prise de parole de circonstance, l’auteur s’est contenté de lancer un merci ! merci ! merci !… qu’il a ensuite développé en égrenant le nom d’une série de personnalités, appuyé d’un commentaire toujours élogieux et plein de gratitude. Il s’est limité à cet exercice de politesse, en attendant de revenir plus en profondeur de son ouvrage, en fonction des préoccupations qui retiendraient l’attention du public, à l’issue de la note critique de lecture. Se livrant à cet exercice, Pr Jean-Jacques Tandia, enseignant-chercheur en sociolinguistique à l’UDs, a observé d’emblée que le titre de cet ouvrage de cent soixante pages dégage une corrélation entre deux champs qui se neutralisent, tel le couple aveugle-estropiée où celui-ci sollicite l’appui de celui-là pour se mouvoir, pendant que l’aveugle a besoin de l’aide de son vis-à-vis pour se repérer dans l’espace. Et dès l’entame du corps du texte, Alexandre Djimeli aménage l’audition générale de son lectorat en définissant un pacte de lecture, afin d’orienter le sens dans lequel il voudrait que l’ouvrage soit perçu. Le produit des efforts de l’auteur s’articule autour de deux axes. Le premier est traversé par un balisage théorique en cinq chapitres. Le premier : "Médias et politique, un mariage arrangé ?" illustre bien le postulat selon lequel, l’action politique n’est pas possible sans l’accompagnement des médias. Le deuxième : "Médias et politique : des relations ambigus." revient sur la problématique de ce couple, dans lequel les conjoints s’aiment et se détestent sans jamais se séparer. Le troisième : "Médias et politique : le tournant technologique." montre que l’avènement des technologies de l’information et de la communication, TIC, a fondamentalement modifié la nature des rapports entre les instances politique et médiatique, dans les processus de construction et de structuration de l’opinion. Le quatrième : "Médias et politique : entre ordre et liberté." retrace la politique camerounaise des médias, qui semble avoir évolué d’un musèlement systématique vers une libération de la parole. Le cinquième : "Médias et politique : l’épreuve du genre." revient sur les stratégies et modes opératoires, des femmes journalistes et des femmes politiques. « Un ouvrage dont les chapitres sont gouvernés par une logique d’interdisciplinarité. » Au bout de cet axe de réflexion, l’auteur conclut que le couple « Médias et politique donne à observer une logique des acteurs, qui se déploient de façon à exister, au sens philosophique du terme, dans leur champ propre et à investir le champ de l’autre et inversement… » Dans un second mouvement de réflexion, l’auteur étudie cinq cas pratiques, qui servent d’échantillons illustratifs aux théories développées, en amont. Le premier de ces cas constitue le projet politique des médias de Hamidou Marafa Yaya, ex-secrétaire général de la présidence de la République, dont les médias utilisent les écrits d’abord à des fins commerciales, et subsidiairement d’information. Le deuxième cas pratique porte sur les sanctions du Conseil national de la communication, CNC, et revient sur les relations tendues entre cet organe de régulation et les médias camerounais. Ici, l’analyse montre que nombre de décisions du CNC n’ont aucun fondement juridique. Le troisième cas s’intéresse à Netwell et la démocratisation de l’informatisation électorale. Dans ce cas, Djimeli revient sur la tentative de cet organisme de contrôler le processus électoral, sans grand succès, à l’aide des TIC. Le quatrième cas : "Média, changement de stabilité politique dans le monde" effectue un voyage du global au local, pour conclure que « Si les médias ont favorisé l’alternance à la tête de certains Etats dans le monde, cette dynamique s’est curieusement liquéfiée sur le cas Cameroun, légitimant cette exception qui fait dire que le "Cameroun c’est le Cameroun"… » Le dernier cas s’épanche sur ce qu’on appellerait le Ladies boom au parlement, en 2013, avec l’arrivée de cinquante-six femmes sur cent quatre-vingt députés. Au sortir de cette seconde partie de sa lecture, Pr Tandia se délecte de la tonalité didactique de l’auteur, car les cas étudiés prouvant « à suffisance que dans le contexte camerounais, les champs politique et médiatique participent tous ensemble au processus de construction et de déconstruction de la démocratie… » De façon plus générale, « cet ouvrage saisi le lecteur par la logique d’interdisciplinarité », qui gouverne des chapitres à travers lesquels Djimeli revisite « un thème ancien, en le marquant de sa quête d’un idéal démocratique au Cameroun… » Selon les mots de Tandia cependant, les résultats obtenus à partir des intentions exprimées par l’auteur restent sujets à caution. De plus, le sociolinguiste « aurait souhaité voir des analyses se développer autour de l’instance citoyenne. Cette instance sans histoire… », qui est le pôle de destination de toutes les actions initiées par les instances politique et médiatique. L’essai de Djimeli est paru aux éditions Ifrikiya, dans la collection "Interligne" où l’auteur a déjà publié deux de ses précédents avant livres : "Bakassi. Sur les chemins escarpés d’une reconstruction", en 2011 ; "Capital contre le journalisme", en 2012. Le 15 mai dernier une cérémonie similaire à celle de Dschang a eu lieu à l’Institut français de Douala. De l’avis de Nazaire Mvogo, l’éditeur, « la veille de la célébration de la fête Nationale de l’unité a été un prétexte idoine à l’organisation de la présente cérémonie de dédicace, car nous pensons que le livre participe aussi à l’intégration nationale… »
Roch Kenfack