L’ambassadeur de France a visité les projets réalisés avec le concours financier de Nantes.
« Dschang est une ville très importante pour l’amitié franco-camerounaise… » Gilles Thibault, ambassadeur de France au Cameroun
Les 17 et 18 mai 2018, la cité de Dschang a accueilli la visite de deux hôtes de marque. L’un a pour nom Gilles Thibault, ambassadeur de France au Cameroun. Il s’est fait accompagner par Christian Yoka, directeur régional de l’Agence française de développement, AFD, pour l’Afrique Centrale.
Le diplomate est venu porter une appréciation personnelle, sur les fruits de la coopération décentralisée Dschang-Nantes, dont un tableau élogieux lui a toujours été peint. A ce titre, il a résumé l’objet de sa visite dans une phrase : « Comme ambassadeur de France, j’ai beaucoup de choses à voir et à faire à Dschang, sans oublier de rencontrer aussi mes compatriotes qui s’y trouvent. »
Donnant son sentiment à la fin de sa descente sur le terrain, il a été affirmatif : « Dschang est une ville très importante pour l’amitié franco-camerounaise. Elle a des liens forts et anciens avec Nantes. Les deux maires travaillent au quotidien depuis des années sur différents projets. Nantes s’est occupée également de la rénovation du musée des civilisations du Cameroun, et du financement du projet "Route des chefferies"… »
Continuant de s’épancher sur les raisons de sa visite de travail, il a souligné l’appui que l’Agence française de développement, AFD, apporte aux projets initiés par la commune et à l’université locale, dont il a échangé avec le recteur à huis clos et visité le laboratoire de géomatique, ainsi qu’un projet admis à un financement imminent.
De son côté, le gestionnaire de l’outil du soutien financier français s’est préoccupé plus de l’état d’avancement des travaux réalisés sur financement AFD. Le plus récent en date porte sur le projet "Energies renouvelables", dont l’implémentation vise à « Offrir une énergie permanente et durable aux populations, afin de favoriser leur qualité de vie ainsi que le développement socio-économique de la ville… »
De façon concrète, ce projet se résume en la réalisation de cinq microcentrales hydro-électriques dans la commune. D’ici à la fin de l’année en cours, la construction de deux d’entre elles sera achevée. La première est située en face de l’entrée de la gare routière de Lefock. Les études de terrain ont montré que ce site pourra produire quinze (15 KW), et couvrir les besoin d’une centaine de structures : ménages, commerces et agences de voyage.
Les microcentrales à construire arriveront à s’autofinancer au bout de cinq ans.
L’autre site devant produire de l’électricité en 2018 se trouve à Lingang, dans le groupement Foto. Sa puissance attendue s’élève à trente-sept (37 KW), pour couvrir les besoins de près de trois centaines de structures : un centre de santé, un collège d’enseignement secondaire, deux écoles primaires, un marché et des ménages.
Leurs études de faisabilité ayant été concluantes, les trois autres microcentrales sont aujourd’hui au stade de la recherche de financements, pour leur réalisation. Elles ont pour noms : Fotetsa, Leppè-Foto et falaise de Foréké-Dschang. Pour l’instant, le projet "Energies renouvelables" correspond à un coût total de quatre cent douze millions (412 000 000 Fcfa).
En valeurs relatives, la répartition des charges en ressources humaines valorisées et/ou en numéraire entre les partenaires est de : Dschang 10% ; Electriciens sans frontières (ESF) 17% ; Nantes Métropole 8% ; Agence française de développement (AFD) 65%.
Entre autres préoccupations, le directeur de l’AFD a insisté sur la nécessité de penser le projet, de sorte que sa pérennisation ne pèse pas trop sur la trésorerie de la commune. Face à cette appréhension, il a été rassuré sur un constat : « Les études de rentabilité ont montré qu’au bout de cinq (5 ans), les ouvrages réalisés arriveraient à assurer le renouvellement des équipements, ainsi que le temps de travail consacré par les personnels communaux… »
Roch Kenfack
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Impressions de CHRISTIAN YOKA, directeur de l’Agence française de développement, AFD/région Afrique Centrale.
Ce qu’on a vu était particulièrement intéressant. Ce sont des projets essentiels pour nous, puisqu’il s’agit de fournir de l’électricité en zone rurale à des populations qui jusqu’à présent n’y avaient pas accès. Ce qui est remarquable dans cette opération pour nous, c’est le fait que la commune de Dschang a été elle-même à l’initiative de ce projet, dans le cadre de sa coopération décentralisée avec la ville de Nantes. Elle a identifié toute seule son potentiel hydro-électrique et décidé de le mettre en valeur. Pour nous, ce sont des exemples importants à soutenir et à accompagner. Maintenant, le défi est de pérenniser ce qui a été fait, au travers de formules qui ne pèseraient pas trop sur le budget du maire.
Impressions de GILLES THIBAULT, ambassadeur de France au Cameroun, à l’issue de sa visite à Dschang.
Ce que j’ai vu à Dschang est exemplaire. C’est un modèle à suivre. Evidemment, on pourrait à partir du compost valoriser les filières biologiques à travers une agriculture durable. Il faudrait pour cela dire aux gens qu’ils peuvent ainsi avoir des produits biologiques à cent pour cent. De plus, les engrais chimiques coûtent chers et sont mauvais pour la santé. Dschang est en même temps un des endroits du Cameroun où il y a encore une Alliance franco-camerounaise, qui est un centre de polarisation de la vie culturelle anglophone, francophone, camerounaise et mondiale unique. Pour moi ambassadeur de France, vous comprenez que ça a d’autant plus de sens d’être là que quand j’arrive dans un endroit comme celui-ci, je vois que l’Union européenne y est partie prenante. Or le cinquième du budget de l’Union européenne est fourni par la France. L’Allemagne fournit un montant identique, puis viennent le Royaume-Uni, l’Italie, l’Espagne et d’autres. Bref, on contribue chacun au prorata de ses ressources.
Cependant, que la pérennisation des réalisations se fasse par la mobilisation des acteurs communaux, étatiques et privés également. Je suis étonné depuis un an et demi que je suis au Cameroun, de découvrir des villas monumentales dans des coins perdus. Quand je demande à qui ça appartient, on me dit c’est à monsieur untel. Et lorsque je veux savoir quand il y séjourne, j’apprends qu’il n’y vient jamais. Pourtant, il aurait financé trois microcentrales hydro-électriques, que cet investissement aurait eu un intérêt. De plus, le nom de la personne serait resté dans le cœur et la mémoire des populations bénéficiaires.
Propos rassurants de SM BEAUDELAIRE DONFACK, maire de Dschang, en vue d’apaiser les appréhensions de ses hôtes.
Nous mettons en place des instruments de gouvernance qui font leurs preuves, au service de la pérennisation de toutes nos réalisations. Et dans le cadre particulier de l’Agence municipale de l’eau et de l’énergie, AMEE, nous avons pu ainsi réhabiliter un réseau Scan Water qui était resté à l’abandon pendant vingt-cinq ans. Et nous sommes sûrs que ce réseau ne tombera plus en panne, car au quotidien on veille sur la qualité de l’eau en même temps que de la fonctionnalité des installations. Pour la préoccupation du directeur de l’AFD, nous envisageons même pour ces structures le modèle d’une économie mixte. Nous sommes d’ailleurs en pourparlers très avancés avec l’opérateur électrique ENEO et le gouvernement, pour une rétrocession de l’ancien site la centrale hydro-électrique de Dschang. Si cette rétrocession nous est accordée et que nous trouvions des financements pour sa réhabilitation, nous serions obligés de signer des conventions de partenariat technique avec ENEO, pour nous accompagner. Ceci se justifie dans la mesure où l’AMEE aura tout d’un coup une assiette d’activités plus large et lourde. Elle aurait donc besoin d’un accompagnement local dans la bonne gestion de toutes ses activités.
Propos recueillis par
Roch Kenfack